À bâtons rompus avec... Robert Wilson et Lucinda Childs, janvier 1978 (58’)

Troisième collaboration de Lucinda Childs avec Robert Wilson, I was sitting on my patio this guy appeared I thought I was hallucinating est une pièce de théâtre créée au Cherry Lane Theater de New York le 10 mai 1977. Dans le cadre d’une tournée aux Etats-Unis et en Europe, le spectacle est présenté, en janvier 1978, à Paris au Théâtre de la Renaissance. C’est à cette occasion que Lise Brunel réalise le présent entretien avec les deux artistes [1].

Composé de deux actes sur une musique d’Alan Lloyd, l was sitting on my patio met en scène "Un homme [qui] soliloque [...]. Son discours, sorte de rêve éveillé, s’adresse à des personnages invisibles ou à un interlocuteur imaginaire qu’il appelle au téléphone. Sur un écran, passent les images désordonnées de son paysage mental. [...] Le texte que dit Robert Wilson en première partie est [ensuite] repris intégralement par Lucinda Childs, dans le même décor, sur la même musique. Mais les interprétations se ressemblent si peu que Lucinda Childs joue une pièce différente" [2].

L’entretien est centré sur l’analyse de la pièce. Lise Brunel s’interroge sur les rapports qu’entretiennent les deux personnages solitaires et leur propre relation au texte énoncé. Lucinda Childs explique que cette pièce est une co-création avec Robert Wilson, chacun mettant en scène sa propre partie. Pour ce dernier, “le concept de la pièce, c’est de prendre un texte avec deux personnes différentes, deux points de vue différents". Néanmoins, le texte ne constitue – selon lui – qu’un des éléments à égalité avec “la musique, le décor, le son des paroles et le mouvement”. Au-delà d’une "histoire sur les hallucinations”, le spectacle parle plutôt de nos rêves éveillés (“day dream”). Cette atmosphère de "temps suspendu" est d’autant plus prégnante - ajoute Lucinda Childs - que, dans l’écriture de R. Wilson, l’histoire ne comporte pas de début ni de fin.

Lise Brunel cherche à savoir comment l’action s’articule avec le texte et se souvient de Einstein on the beach (1976) où, selon elle, “l’action n’avait pas de rapport avec ce qui était dit”. Robert Wilson confirme qu’il utilise ici encore une fois ce procédé et évoque alors le texte comme “une chaine” où chaque maillon comporterait une couleur dont les variations évolueraient en fonction de l’émotion induite par la phrase.

Frappée par le côté épuré du spectacle, Lise Brunel conclut l’entretien avec des questions concernant la mise en scène, notamment l’utilisation de la vidéo - qui, selon Lucinda Childs, n’a pas d’importance en tant que telle mais sert surtout à rompre l’unité - , les objets, le décor et lumières, autant d’éléments qui, "aussi précis que les personnages eux-mêmes", permettent, selon la journaliste, de ranger la pièce dans le courant du minimalisme. L’entretien donnera lieu à un article dans Le Matin de Paris (18 janvier 1978) titré : " Soliloques en noir et blanc”.

JPEG - 1.7 Mio
Programme du Théâtre de la Renaissance de Paris pour quinze représentations (16-29 janvier 1978) / Fonds Lucinda Childs – Médiathèque du CN D
Manuscrit de l’entretien avec Robert wilson et Lucinda Childs, janvier 1978
Fonds Lise Brunel – Médiathèque du CN D
PNG - 888.4 kio
16 pages - cliquer pour consulter le manuscrit


[2Extrait du programme du Théâtre de Carouge-Atelier de Genève (10-11 février 1978) / Fonds Lucinda Childs – Médiathèque du CN D