Notation du mouvement

Systèmes de notation du mouvement : aperçu

[Extrait vidéo de "Deux notations du mouvement, deux regards" / réalisation Centre national de la danse ; intervenantes Jacqueline Challet-Haas et Eliane Mirzabekiantz - Pantin, 2006]

Depuis la fin du Moyen-Âge, plus d’une centaine de systèmes de notation du mouvement ont vu le jour en Occident, du manuscrit du XVe découvert à Cervera (Espagne, Catalogne), première tentative de transcription par des signes du déplacement dans l’espace d’un danseur, jusqu’aux notes personnelles de chorégraphie de certains artistes contemporains. Que ce soit à travers les dessins de Blasis au XIXe siècle ou les partitions Laban, Conté ou Benesh au XXe siècle, chacun de ces systèmes témoigne d’une manière singulière de comprendre le mouvement, marquée par le contexte historique et l’imaginaire culturel de la société dans laquelle il apparaît, mais aussi nourrie des recherches précédentes.

À la multiplicité des systèmes répond la diversité des fonctions auxquelles ils se prêtent. Tantôt simple aide-mémoire dans le processus de travail, tantôt support d’apprentissage, voire de création, la notation est au coeur des questions de constitution, de préservation et de transmission des répertoires. Elle s’affirme aussi comme un outil remarquable pour analyser les composantes du mouvement et les formes. À ce titre, son utilisation dépasse largement le champ de la danse : l’anthropologie par exemple y fait appel pour comprendre la spécificité culturelle des comportements moteurs.

Ann Hutchinson-Guest distingue cinq grandes catégories de systèmes :
> les systèmes ayant recours aux mots et abréviations (les plus anciens),
> les systèmes de notation adaptant la portée musicale à l’écriture du mouvement (Stepanov, Conté),
> les systèmes figuratifs (Blasis, Saint-Léon, Zorn),
> les systèmes de tracés représentant les déplacements et trajets (Feuillet),
> les systèmes de signes abstraits (Laban et Benesh).qui proposent des grammaires complexes, semblables à des langues structurées, et qui font l’objet de formations supérieures conduisant à la profession de notateur.

La cinétographie Laban
La cinétographie Laban voit le jour en 1928 et sera utilisée dans un premier temps pour consigner des exercices et des danses chorales. C’est Albrecht Knust, danseur et élève de Laban, qui se chargera de développer des solutions adaptées aux situations de transcription concrète de ballets. Le fonds d’archives d’Albrecht Knust, donné au CND par Roderyk Lange en 2004, constitue une source essentielle pour connaîtreet étudier tous les développements du système de cinétographie entre 1928 et 1978 et les débats théoriques qu’ils ont suscités.

La choréologie ou notation Benesh
Ce système d’écriture a été présenté en 1955 à l’Opéra royal de Londres, et a permis depuis lors de noter et conserver un vaste répertoire représentatif de diverses formes de danse, notamment les ballets classiques. La choréologie utilise des signes abstraits, mais les situe sur une portée de type musical. En France, Régine Chopinot, dans les années 1980 (cf. ses archives déposées au CND), et Angelin Preljocaj jusqu’à aujourd’hui, se sont adjoint la collaboration de choréologues dont les partitions ont permis de constituer d’importantes archives de leur répertoire.

La notation Conté
Musicien et chorégraphe, Pierre Conté décide dans les années 1920 de se servir des acquis de l’écriture musicale pour noter le mouvement. Il conçoit une théorie d’ensemble permettant de conjuguer les facteurs communs à la danse et à la musique avec les données propres au mouvement et à l’espace. Il note ainsi l’ensemble de ses créations chorégraphiques. Après lui, la chorégraphe Francine Lancelot s’est aussi servi de ce système pour fixer certaines de ses créations et transcrire des danses anciennes jusqu’ici conservées en écriture Feuillet (cf. ses archives déposées au CND).