Citer, exciter
Avec cette crise dans la transmission et l’expérience moderne de la discontinuité s’inaugure la possibilité de la citation. Citer, au sens étymologique, c’est mettre en mouvement. Il y a là une force motrice, une puissance d’action : on prend quelque chose, une danse en l’occurrence, on l’extrait d’un contexte, on la déplace pour la placer dans un autre contexte sur lequel cette citation va agir. Cela déplace ou incorpore un temps dans un autre temps, un corps dans un autre corps et même un médium dans un autre. Au régime de la transmission s’oppose alors celui de la citation. Cette dernière peut être thématisée, comme dans Le Dernier Spectacle de Jérôme Bel (1998), … d’un faune (éclats) (2000) du Quatuor Knust, Écran somnambule (2009 et 2012) de Latifa Laâbissi ou d’autres. Mais elle peut être aussi beaucoup plus trouble, parce que liée à une survivance plus inconsciente, une forme de transmission véhiculée par l’image dans l’histoire des gestes et cela malgré la discontinuité. Cette présence du passé dans les gestes contemporains est travaillée par certains chorégraphes aujourd’hui, notamment chez Loïc Touzé : poussé à ses limites, le travail de la citation opère là dans une forme de rêve où les traces de gestes anciens sont activées.